La déculottée de Bouygues Télécom

Bouygues Telecom encaisse une sévère défaite judiciaire face à Free

L'opérateur demandait des centaines de millions d'euros de réparations dans le dossier de l'itinérance. Le Tribunal de commerce l'a débouté sans ménagement.

718,5 millions d'euros. C'est la somme que réclamait Bouygues Telecom à Free en réparation de préjudices subis depuis l'arrivée de Xavier Niel sur le marché de la téléphonie mobile en 2012. Après plus de quatre ans de procédures , le tribunal de commerce de Paris a tranché jeudi dernier. Le groupe de Martin Bouygues n'aura rien. Pire, il est condamné à rembourser 350.000 euros à Free, au titre des frais de justice.

Bouygues peut encore faire appel de la décision. Mais c'est un revers de plus pour le groupe, qui s'est toujours plaint des conditions dans lesquelles la France avait laissé se lancer un quatrième acteur mobile. Même s'il a fini par encaisser le choc sur le terrain commercial, le géant du BTP a toujours fait chou blanc devant les différentes juridictions, malgré une dizaine de recours contre Free.

« Concurrence déloyale »

La décision du Tribunal de commerce signe une nouvelle défaite d'importance. Les sommes en jeu étaient énormes et l'image du trublion était en jeu : Bouygues accusait Free d'avoir trompé ses clients - et il tenait à le faire savoir.

Le fond de l'affaire tient à l'accord d'itinérance 2G et 3G dont dispose Free depuis 2012 sur le réseau d'Orange. C'est ce qui a permis à Free de proposer ses services sur tout le territoire sans attendre d'avoir construit son propre réseau. Sauf que, selon Bouygues, Free bridait volontairement les débits de ses clients lorsqu'ils étaient connectés aux antennes d'Orange - afin de payer moins cher l'ex-opérateur historique.

Pour Bouygues, la pilule était dure à avaler. Surtout après que Xavier Niel en personne avait pris un malin plaisir, lors de sa conférence de lancement, à narguer les concurrents en offrant un volume impressionnant de 3 Go de « fair use » - c'est-à-dire la quantité de données accordée à ses clients avant que le débit ne soit fortement limité -, du jamais vu à l'époque.

Pour l'opérateur de Martin Bouygues, tout cela relevait de la concurrence déloyale. Free avait fait une promesse à ses abonnés qu'il ne tenait que très partiellement. Et la concurrence avait été obligée de suivre, en sacrifiant ses précieuses marges. Un manque à gagner estimé par Bouygues à 5 euros par mois et par abonné, entre 2012 et 2016... ce qui explique la mirobolante addition présentée à la Cour.

Le tacle des juges

 

Sauf qu'après examen, les juges ont complètement battu en brèche les arguments de Bouygues Telecom. Le jugement consulté par « Les Echos » explique que « les mesures proposées par Bouygues Telecom ne peuvent avoir une force probante supérieure à celle de l'Arcep ». En clair, le bridage allégué n'est pas prouvé. Le gendarme des télécoms, qui est indépendant, lui, veillait au grain. Et il n'a constaté aucun bridage qui ne soit pas lié à son action de régulation.

Le Tribunal se permet même un petit tacle, quand il note que le fameux « fair use » « permet à Free Mobile d'assurer une utilisation équitable d'Internet entre les utilisateurs [...] plutôt que de valoriser très cher la data, comme l'a fait Bouygues Telecom dans ses offres ». Le vocabulaire est juridique. Mais la phrase fait écho à la célèbre sortie de Xavier Niel en 2012 : « Si vous ne passez pas chez Free mobile, vous êtes des pigeons. »

By Les Echos

Publié le 18 janvier 2019 à 10h47 18/01/19 par poupon Lui envoyer un message


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